06 février 2022

Une Ford Escort XR3 sur le Paris-Dakar !

Josef Pointinger n’est pas un inconnu dans le sport automobile. En effet, cet autrichien a commencé à participer à de nombreux rallyes nationaux dès le milieu des années 70, au volant de différentes voitures…Des SAAB 96 V4, des coccinelles VW 1500, des Citroën Dyane 6 (Si si, on a des photos !!), des Lada VAZ, des Ford Escort RS 1300, 1800 et 2000, puis des Ford Fiesta XR2. Dès 1976, il participe même à des épreuves internationales, notamment à plusieurs éditions du rallye de l’Acropole, en Grèce.


Ses différentes participations l’amènent à avoir l’opportunité en 1985 de pouvoir racheter une Ford Escort XR3i qui avait participé au championnat national autrichien, celle d’un pilote également très connu, Christoph Dirtl. 

En effet, lors de la saison 85, la voiture appartenant à Ford Autriche est fortement endommagée lors d'un accident au cours d'un rallye et l'épave est alors mise en vente. Josef Pointinger s’empresse de l’acheter et la confie à Ford Hammerschmid, un préparateur local, pour la reconstruire et la préparer en groupe A.
Dès lors, courant 1986, Josef va s’aligner sur plusieurs épreuves avec cette XR3i, notamment le Rallye de l’Acropole, le Barum Rally ( rallye de Tchécoslovaquie à l’époque) et surtout le CanAMex Road Rally (Canada, États-Unis, Mexique), un rallye partant de Vancouvert, traversant les états-unis du nord au Sud jusqu’à El Paso, descendant jusqu’à Acapulco, remontant par san diego, Denver, Edmonton, Haines pour finir au point de départ, Vancouvert ! de 23000 km, une paille ! 


En 1987, toujours avec la même voiture, Sepp (le surnom de Josef) participe à nouveau au rallye de l’Acropole mais aussi à l’Hebros Rally (en Bulgarie).
A cette époque, Pointinger souhaite vraiment participer à de grandes épreuves de renommée internationale, en dehors l'Autriche. Après le CanAMex, il est en quête d’une nouvelle grande aventure. Son copilote, Erwin LINTNER, dirigeait alors une société de relations publiques et avait une petite expérience du désert. C’est donc naturellement qu’ils décident de participer au Dakar, d’autant que l’épreuve fêtait ses 10 ans. 
De plus, les exploits de Guy Colsoul sur l’Opel Manta en 84 et 85 les confortent dans le fait qu’un véhicule 2 roues motrices peut jouer les trouble-faits et à une chance de tirer son épingle du jeu. Et puis, au pire, viser simplement la victoire dans la classe est aussi un enjeu alléchant. 


Côté préparation, la carrosserie et le châssis ont été déjà renforcés pour le rallye de l'Acropole (rallye qui sollicite énormément le châssis) ainsi que pour le CanAmex qui propose des spéciales bien plus longues qu’en rallye traditionnel. De ce côté-là, rien de plus ne sera donc fait. Mais malgré, de nombreuses autres adaptations spécifiques liées au Dakar ont été réalisées.
En tout premier lieu, Josef change l'injection pour les carburateurs, pour deux raisons. D’abord la qualité de l’essence en Afrique laisse souvent à désirer et puis, en cas de problème avec l'alimentation en carburant, c'est plus facile à réparer ! Les autres spécifications étaient une suspension plus haute, réglable en tarage, et un réservoir supplémentaire pour affronter les spéciales de plusieurs centaines de kilomètres. 


Côté finances, le soutien de BAUHAUS, une chaine de magasins Autrichiens ainsi qu’un appel à souscriptions de petits partenaires indépendants (via des bons de souscriptions qui seront collés sur la carrosserie) permet de réunir un budget suffisant pour notre équipage. Par contre, la petite Ford ne pourra compter que sur elle-même, aucune assistance n’est prévue. Au-delà du fait que Sepp et son copilote devront se débrouiller seuls en cas de problème, cela implique également qu’ils devront charger la voiture avec les pièces de rechange…sur une galerie ! Or, le poids est l’ennemi juré des deux roues motrices lors d’un Dakar !

Il n’empêche que le 1er janvier 1988, la Ford XR3 (il n’y a plus de i, puisque le système d’injection a disparu) passe les vérifications techniques sans soucis et trône dans la Place d’Armes du château de Versailles, aux côtés des Buggy Kouros de Hubert Auriol et Xavier Lapeyre. Elle est même la première voiture à apparaitre sur les listes et surtout à s’élancer sur le podium, avec son numéro 199, le 200 étant réservé à notre Hubert national.


Ce Dakar 1988 qui attend Josef et Erwin a été concocté pour la première fois par René Metge, ancien vainqueur en 81, 84 et 86. Il promet d’être à la hauteur de son dixième anniversaire, dur, très dur. 3 semaines de compétition, 13000 km dont plus de la moitié en spéciales chronométrée et une seule journée de repos à Agadez, pour ceux qui y arriveront.
Le nombre de fous furieux au départ est impressionnant, 311 voitures, 183 motos et 109 camions !


La première à s’élancer lors du prologue sera encore une fois la « petite » Escort XR3 de Sepp et Erwin. Mais le terrain qui les attend à Courdimanche, tout près de Cergy, est recouvert de boue en ce premier jour de Janvier. Prudent, l’équipage décide de monter la suspension le plus haut possible. Mauvais choix au final car l’arbre de transmission est trop sollicité, un joint se casse et la Ford s’immobilise très vite au milieu des 5 km prévus ! Pas le choix, une fois le diagnostic réalisé, il faut changer l'arbre de transmission en plein prologue !  Aidé par le public, ils réussiront finalement à s’extirper de ce piège de boue et à terminer cette première spéciale de sélection ! Le 199 est assez loin au classement, mais qu’importe, la course continue et l’équipage rejoint Sète pour la traversée de la Méditerranée.


 Sitôt arrivés en terre Africaine, les concurrents s’élancent pour une liaison les menant jusqu’à El Oued…600 premiers kilomètres de mise en jambe avant la première étape chronométrée, El-Oued / Hassi-Messaoud. Là encore, près de 600 km dont 250 km de spéciale à travers le grand Erg Algérien…qui va s’avérer dantesque et infernal pour l’immense majorité de la caravane et …notre petite XR3 ! Les premiers concurrents (autant dire les équipages de pointe) réussissent à passer tant bien que mal tandis que les derniers arrivent dans des dunes où le sable remué n’est plus porteur, alors que la visibilité diminue à la nuit tombante. Les concurrents s’ensablent et se perdent, c’est une scène dantesque ! 


157 concurrents, soit près du tiers du rallye, devront renoncer ce jour-là. Parmi eux, notre Ford qui est à la peine avec son petit moteur, ses deux roues motrices et sa surcharge de poids. Très vite, Sepp et Erwin voient que ces dunes du grand Erg seront infranchissables, en tout cas dans le temps imparti. Ils ne verront jamais Hassi-messaoud, encore moins Dakar, l’abandon est irrémédiable.  
L’équipage décide donc de remonter sur Alger, déçu de ne plus faire partie de l’aventure mais content de ramener la voiture entière (ce qui n’est pas le cas de tous les abandons de cette première spéciale !).
L’aventure s’arrête donc très vite pour l’équipage n°199, qui remonte jusqu’en Autriche à bord de la voiture. Cette année-là , ils étaient 5 à être partis en deux roues motrices, 4 buggy et notre Ford. 1 seul sera finalement classé à Dakar, Marc Joineau sur son buggy Duc de Bourgogne. Pour les autres, ce grand Erg Algérien aura été fatal !


Mais notre Ford Escort aura encore une vie après le Dakar puisque Josef Pointinger et le préparateurHammerschmid reconstruisent complètement la voiture avec de nouvelles spécifications et la modifient en RS Turbo. Avec cette XR3 RS Turbo, Ils vont ainsi participer au YU-Rally (en Serbie), au Barum Rally et courir sur quelques épreuves en Autriche. Fin 1990, la voiture est vendue en Hongrie et Sepp ne sait plus du tout ce qu’elle est devenue. Existe-t-elle encore, a-t-elle disparu, mystère donc autour de la seule et unique Ford XR3 ayant participé au Paris-Alger Dakar !

Un immense merci à Josef Pointinger pour les informations et photos !!!!

Grand Merci à Jeff pour son texte et les photos qu'il a collecté sur Dakardantan

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