15 juin 2020

L'histoire de la première McLaren F1 vécue de l'intérieur

L’histoire des Supercars est souvent parsemée d’anecdotes à la hauteur de leurs performances. La McLaren F1 n’y échappe pas. Quand Gordon Murray décide qu’il passera noël en famille…

 

6000 heures pour le châssis 

La McLaren F1 est un chef d’oeuvre, et pourtant j’aime employer ce qualificatif à bon escient. Pour toute oeuvre, il faut un maître, et celui de la F1 sera Gordon Murray. Il faut du temps aussi. Ainsi, le premier prototype de châssis/carrosserie monocoque pour la première 'vraie' McLaren F1, nommée en interne “XP1”,  aura absorbé quelque 6 000 heures de travail à l’atelier de Shalford, avant d’être prêt à recevoir sa mécanique début décembre 1992. Le rythme de travail est élevé mais voir ce châssis achevé, représente une première petite victoire pour l’équipe de McLaren. Mais ceux qui pensaient se reposer vont être déçus. 

La voiture roulera à Noël  

C’était en effet sans compter sur ce bon vieux Gordon Murray, qui déclare à ses hommes : 
“The first car would be running by Christmas, come hell or high water." Phrase que l’on pourrait traduire par “La voiture roulera à Noël, en enfer ou en crue”. Mais que je traduirais plutôt par : “La voiture roulera à Noël, sinon je tue le responsable”. Commence alors un véritable marathon dont les protagonistes vont se rappeler longtemps. Une majorité des hommes composant l’équipe étaient issus de l'équipe de Formule 1.. La plupart pensaient qu’en rejoignant le département voitures de route, ils auraient une vie moins agitée. C’était loupé. Mais pourquoi fallait-il absolument que cette voiture roule avant les fêtes? 

 

Gordon a un avion à prendre 

“Gordon Murray avait réservé un vol pour l'Afrique du Sud à 15 h le 23 décembre. Il était absolument inenvisageable qu’il ne passe pas noël en famille. Sa détermination à faire rouler la voiture avant son départ était totale. Même si c’était pour parcourir un mètre ou deux dans le parking, il fallait qu’elle roule avant le 23. C’était comme ça, il avait décidé que ce serait fini avant son départ en congés” racontait un employé de McLaren à Jalopnik il y a quelques années. C’est dans ces moments là qu’on se rend compte de la valeur de son équipe. Et celle-ci aurait été capable de suivre Murray jusqu’à la mort. 

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The lost week-end 

Avant de serrer le dernier boulon, de la sueur a coulé sur les fronts. L’achèvement trépidant de cette “XP1” est depuis gravé dans le marbre de la mythologie de McLaren Cars. Encore aujourd’hui les employés de McLaren appellent cela “The Lost Week-end”. Le week-end perdu. La raison est simple : personne n’a dormi dans les jours précédents le 23 décembre. 
L’épouse du mécanicien Paul Flood a accouché une semaine avant “la livraison de la voiture”. En apprenant la nouvelle, Paul prendra une heure pour se rendre à l'hôpital et rencontrer son enfant quelques minutes à peine. Avant de revenir aussitôt à l’usine. Certaines guerres n’attendent pas. 

23 décembre, au matin 

Ce matin là, Gordon Murray déboule tôt à l’usine, avec une chemise colorée et sa magnifique moustache. Il fallait au moins cela pour assister à la représentation physique, et roulante de son génie, celle là même qu’il avait décidé de conduire ce matin. 
La boutique est peuplée de fantômes aux visages gris. Les hommes sont épuisés, mais tous ont envie d’en finir et de démarrer cette putain de bagnole qui occupe leurs journées et leurs nuits. On pousse la “XP1” au centre de l’atelier. Les roues couinent sur le sol peint de l’atelier. Elle est là, entièrement nue, elle n’a pas reçu de peinture, prête à naître officiellement. Autour du berceau, les techniciens de TAG (Techniques d’Avant Garde, un partenaire historique de McLaren, on vous en reparlera un jour) sont présents entourés de toute l’équipe technique de McLaren Cars. Le bébé va naître et papa Gordon va aller rejoindre la mère Noël. 

Houston, on a un problème 

Les gars de chez TAG vérifient les ultimes paramètres. Gordon s’avance, on lui ouvre la portière. Il descend dans le siège central de la McLaren et dans un geste décidé, appuie sur le bouton de démarrage. Le moteur V12 BMW commence à faire trembler la pièce, mais ce tremblement va vite se propager aux membres de l’équipe, et pour d’autres raisons. 
 Alors que l’on s’attend à voir avancer le bébé, rien ne se passe, et surtout pas le premier rapport de boîte.  Après une seconde tentative infructueuse, les techniciens se jettent sur “XP1” comme une bande de crevards sur ta soeur en mini jupe. Tout le monde rapplique et le coupable est rapidement identifié. C’est l’embrayage qui tourne dans le vide à cause d’une erreur de montage. L’arbre est trop long, empêchant l’embrayage de fonctionner correctement. En posant une entretoise, l’embrayage peut enfin mordre. 

Champagne ! 

La XP1 sort alors de l’atelier pour rejoindre la cour extérieure, assaillie par toute l’équipe à coups de bouchons de champagne. Voilà comment on accueille celle qui est alors sur le point de réécrire les normes mondiales de la performance. Après moults embrassades et bulles, la McLaren redémarre. Cette auto qui ne ressemble à rien de connu, va parcourir les 300 mètres qui la sépare du bâtiment “McLaren international”, base principale de TAG-McLaren, située de l’autre côté de la route. C’est Gordon qui va soumettre la McLaren F1 à son premier examen. Si il traverse la route pour rejoindre l’autre bâtiment c’est pour rejoindre la balance de l’écurie, celle qui pèse régulièrement les monoplaces de grand prix. 


La fin de matinée pointe le bout de son nez, Il reste encore quelques poignées de minutes à Gordon Murray pour terminer le travail. 
Sur l’affichage digital de la balance, le verdict tombe : 1003 kg. L’objectif est rempli, la McLaren F1 sera un poids plume. Peu importe si cette performance est réalisée avec une voiture à qui il manque des pièces et non peinte. Gordon a le sourire. 
Il est temps de se diriger vers le parking situé derrière l’atelier de montage. Et d’attraper ce vol. 

Dans le coeur de l'unité 2, l'antre secret de McLaren

Nicolas Laperruque 

Sources : Driving Ambition, The inside story of the McLaren F1, Jalopnik, McLaren cars 

 

 

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